Où le coeur se pose by Tamara McKinley

Auteur:Tamara McKinley [McKinley, Tamara]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Archipel
Publié: 2018-01-15T00:00:00+00:00

11

Julie s’éveilla en sursaut d’un cauchemar dans lequel elle se trouvait enterrée vivante au fond d’un cratère de bombe. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, d’épaisses ténèbres la cernaient. Perdue, terrorisée, elle s’imagina, l’espace d’un instant, qu’il s’agissait de la réalité, épouvantable et tangible. Mais bientôt, reprenant ses esprits, elle huma l’odeur de l’encaustique, celle des draps frais lavés. Elle se rappela où elle était, alluma d’une main tremblante la lampe de chevet.

Presque aveuglée par la lumière, elle constata que quelqu’un, pendant son sommeil, avait tiré les rideaux, ainsi que l’exigeaient les règles du black-out, et emporté le sac contenant les couches, les biberons et le lait maternisé. Son regard se posa sur le lit d’enfant, à l’intérieur duquel William ne se trouvait plus.

Repoussant le drap et la couverture, elle s’apprêtait à enfiler ses vêtements sales, lorsqu’elle avisa ses deux valises, posées à côté de l’armoire. Avec un soupir de reconnaissance, elle sortit de l’une d’elles sa robe de chambre, qu’elle enfila, avant de quitter la chambre à pas de loup, car ce devait être le milieu de la nuit, puis de descendre les deux étages.

Parvenue au rez-de-chaussée, elle découvrit, dans le vestibule, un superbe landau crème et bleu marine. Il s’agissait d’un magnifique engin, dont les roues et les garde-boue rutilaient. La jeune femme le guigna avec envie, en se demandant combien une telle merveille pouvait coûter, et si elle aurait jamais les moyens d’en offrir un à William.

Bien sûr que non, songea-t-elle avec résignation, avant de se diriger en silence vers l’éclairage vacillant qu’elle voyait briller dans la cuisine, où une voix à peine audible fredonnait une berceuse.

Debout sur le seuil de la pièce, elle sentit l’émotion la submerger. La scène aurait été si belle, si sa mère s’était tenue assise là, serrant contre son sein ce petit-fils qu’elle avait attendu avec tant d’impatience.

Harvey s’était couché, comme pour la protéger, contre les pieds meurtris de la logeuse, qui finissait de donner son biberon à William à la lueur du fourneau, sans plus cesser de chanter tout bas pour l’endormir. Le chien leva brièvement la tête, puis, estimant que Julie ne représentait pas une menace, il retourna à sa veille muette. Peggy paraissait flapie, mais il était, dans l’expression de son visage, une douceur qui fit comprendre à l’infirmière qu’elle se sentait heureuse et apaisée.

La logeuse leva le nez, croisa le regard de Julie, échangea avec elle un sourire complice et affectueux.

— Il est sur le point de s’endormir, souffla Peggy. J’espère que nous ne vous avons pas dérangée.

— Je n’ai rien entendu, répondit la jeune femme en ébouriffant les oreilles du chien. J’ai sombré dès que je me suis allongée.

Elle jeta un coup d’œil en direction de la pendule, ouvrit tout grand la bouche, horrifiée. Il était 2 heures du matin.

— Allez vite vous coucher, Peggy. Vous devez être fourbue.

— Je n’arrivais pas à dormir. Quand j’ai entendu le petit remuer, je suis montée le chercher pour qu’il me tienne compagnie.

Elle sourit à sa nouvelle pensionnaire.

— M’occuper de cet adorable bébé me repose autrement plus que d’écouter Jim ronfler.

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